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Déposé à la SACD

LOUIS BRAILLE

Michel Fustier
(toutes les pièces de M.F. sur : http://theatre.enfant.free.fr )


PERSONNAGES
Valentin Haüy, Louis Braille, Charles Barbier,
Louis XVI, le père de Louis Braille,
Guillié, Pignard et Dufau, directeurs successifs de l'Institut des Jeunes Aveugles.
Un spectateur, deux jeunes aveugles: Gérard et Levrat,.

1 - (A Versailles en 1786, présentation des jeunes aveugles au roi Louis XVI))…
L'HISTORIEN DE SERVICE - Au dix-huitième siècle, le siècle des Lumières et de l'Encyclopédie (Diderot, d'Alembert, Rousseau, Voltaire, Condorcet…), la société prit conscience de la condition misérable des personnes handicapées: sourds, sourds-muets, aveugles… Ne pas entendre, ne pas voir au Siècle des Lumières! On s'efforça alors d'apporter une réponse à leurs problèmes. En ce qui concerne les aveugles, Valentin Haüy, Charles Barbier de la Serre et Louis Braille, lui-même aveugle, mirent au point un procédé de lecture qui fut par la suite universellement reconnu: le Braille… L'histoire commence à Versailles, où Valentin Haüy, qui a fondé l'Ecole des jeunes aveugles, vient présenter ses élèves à Louis XVI…
VALENTIN HAÜY - Sire… Je viens vous présenter mes protégés. Ils sont là, dans l'antichambre et vous attendent.
LOUIS XVI – Nous les verrons dans un instant… Vous avez bien du mérite, monsieur Haüy, de vous occuper ainsi de ces jeunes aveugles. Ils sont, je crois, bien malheureux.
VALENTIN HAÜY - Sire, j'ai été pris de pitié… La condition des aveugles est terrible. On se moque d'eux, on les exploite et on les maltraite. Ils en sont même le plus souvent réduits à mendier leur pain et à dormir dans les rues.
LOUIS XVI - On m'a dit que leur infirmité ne leur permettait pas de… ou plutôt, je veux dire… ne sont-ils pas un peu… enfin est-ce que leur infirmité ne s'accompagne pas de certaines… déficiences mentales.
VALENTIN HAÜY - Sire, ils sont aveugles des yeux, mais aucunement de l'esprit. Je dirais au contraire que leur infirmité les rend d'autant plus intelligents. Mais en effet, seraient-ils supérieurement doués, comme ils ne peuvent pas lire, ils ne peuvent accéder à la pleine connaissance et cela les fait paraître inférieurs.
LOUIS XVI - Où avais-je la tête? C'est vrai qu'ils ne peuvent pas lire…
VALENTIN HAÜY - Ou si peu! Ils s'efforcent de le faire avec leurs doigts, car ils ont le toucher infiniment délicat. Malheureusement, pour que cela leur soit possible, nous sommes obligés de leur fabriquer des livres en relief, où les lettres font saillie: cela est très cher, donne beaucoup de peine et demeure très incommode… Nous n'avons en tout que quatorze livres dans notre bibliothèque. Quant à essayer d'écrire eux-mêmes, ils y sont très maladroits. Ainsi n'ont-ils, ni par la lecture, ni par l'écriture, de quoi exercer leur esprit.
LOUIS XVI - Avez-vous ici l'un de ces livres en relief, je serais curieux de le voir?
VALENTIN HAÜY - Oui, sire, je vous ai apporté, pour vous l'offrir, mon "Essai sur l'éducation des aveugles".
LOUIS XVI - Je vous remercie… (il feuillette)… Je vois, je vois… Je vous demande pardon! Je ne devrais pas dire je vois, parlant d'aveugles… Je pense que c'est un exemplaire unique.
VALENTIN HAÜY – Pas tout à fait, mais presque… Et ce sont les jeunes aveugles eux-mêmes qui l'ont imprimé.
LOUIS XVI – Je suis touché de ce cadeau très précieux. Je le conserverai avec émotion… Merci, monsieur Valentin Haüy. Je sais que vous êtes un homme de grand savoir, un éminent linguiste, et je vous félicite de ce que vous avez entrepris. Je veillerai à ce que vous soyez convenablement soutenu. Allons maintenant voir vos protégés….

2 – (A Paris: Louis Braille entre à l'Institut des jeunes aveugles)
L'HHISTORIEN DE SERVICE – Bien plus tard, en I818; un nouvel élève fut présenté par ses parents à l'école fondée par Valentin Haüy.
LE DIRECTEUR GUILLIÈ - Mais dites-moi, monsieur Braille, s'il n'est pas aveugle de naissance, comment est-ce arrivé…?
LE PERE - Un accident, monsieur le Directeur… Je suis sellier et je fabrique des selles et des harnais pour les chevaux… Lui, il venait quelquefois jouer à l'atelier. Un beau jour – il avait trois ans- il a pris un tranchet et s'est mis en tête de couper un morceau de cuir. L'outil a glissé et lui a percé l'œil droit... Peu de temps après l'autre œil s'est infecté et…
LE DIRECTEUR - Dans la correspondance que nous avons échangée vous ne m'aviez pas donné beaucoup de détails.
LE PERE - Eh oui, c'est arrivé comme ça… Quelle pitié! Nous en avons pleuré à chaudes larmes, ma femme et moi! Mais il faut accepter les décrets de la Providence… Louis a dix ans maintenant. Il est très adroit de ses mains et sait très bien fabriquer de petits objets simples. Regardez par exemple ces chaussons, ces tresses… De plus, cela fait trois ans que nous l'envoyons à l'école du village. Il ne peut ni lire ni écrire, mais il écoute. Et il retient tout ce que le maître dit.
LE DIRECTEUR - C'est vrai, ça, Louis, tu retiens tout?
LOUIS BRAILLE - Oui, c'est vrai. Je retiens tout. Peut-être mieux que les autres…
LE PERE - Il est très curieux et il a une très bonne mémoire… Cependant jusque-là, nous étions vraiment navrés qu'il ne puisse pas recevoir une éducation qui réponde à ses besoins. Mais puisque vous l'acceptez dans votre Institut…
LE DIRECTEUR - Nous allons voir ça d'un peu plus près… Dis-moi, mon bonhomme, à nous deux maintenant! que penses-tu de tout cela? Est-ce que tu as envie de venir ici, est-ce que tu n'as pas peur de quitter ta famille.
LOUIS BRAILLE - J'ai envie d'apprendre… J'aime bien ma famille, mais j'ai envie d'apprendre.
LE DIRECTEUR - La vie n'est pas toujours très confortable à l'Institut… Les vieux grands bâtiments dans lesquels nous sommes logés sont humides et froids.
LOUIS BRAILLE - Je suis aveugle, mais j'ai une bonne santé.
LE DIRECTEUR - Tu n'auras pour toi qu'on petit lit dans un grand dortoir pas chauffé. De plus on travaille beaucoup…
LOUIS BRAILLE - Je ne demande que ça.
LE DIRECTEUR - Et la nourriture n'est pas si abondante ni si bonne que je le souhaiterais.
LOUIS BRAILLE - Monsieur, je ne viens pas ici pour manger.
LE DIRECTEUR - Quant aux congés, ils sont rares. Et comme ton village de Coupvray est tout de même à trente lieues de Paris, il te sera difficile de rentrer souvent chez toi.
LOUIS BRAILLE - Monsieur, je veux rester ici. Je sens déjà que c'est ici ma nouvelle demeure. Et je suis prêt à tout pour devenir instruit.
LE DIRECTEUR – Puisqu'il en est ainsi, venez, je vous ferai faire le tour de la maison…

3 – (L'invention du capitaine Charles Barbier de la Serre présentée aux Jeunes Aveugles)
L'HISTORIEN DE SERVICE – Il y avait alors dans l'armée un capitaine d'artillerie très original qui… Mais écoutez-le, il vous dira tout…
CHARLES BARBIER – Monsieur le directeur, je suis le capitaine d'artillerie Charles Barbier de la Serre et j'ai eu l'honneur de fréquenter autrefois l'école militaire en même temps que Bonaparte, que j'ai bien connu…
LE DIRECTEUR PIGNIER – Mon capitaine, je suis très honoré…
CHARLES BARBIER - On m'a conseillé de venir vous trouver, car l'invention que j'ai faite pourrait, m'a-t-on dit, intéresser vos jeunes pensionnaires.
LE DIRECTEUR - Je vous remercie par avance. De quoi s'agit-il?
CHARLES BARBIER - Cela s'appelle "l'écriture de nuit"… Il arrive souvent que la nuit, dans les batailles, nous ayons à transmettre et à recevoir des ordres ou des consignes… J'ai fait la guerre et vous parle en connaissance de cause! Allumer même une lampe serait dangereux. Mais comment écrire et ensuite lire sans y voir…?
LE DIRECTEUR - Je commence à comprendre pourquoi l'on vous a suggéré de venir nous voir. Continuez.
CHARLES BARBIER - Donc, comment lire et écrire sans y voir? J'ai imaginé que l'on puisse poinçonner avec un canif une feuille de papier épais pour y graver le message à transmettre, ce qui peut se faire dans l'obscurité grâce à un système que j'ai inventé, de cadre et de réglette mobile…
LE DIRECTEUR - Et comment procédez-vous?
CHARLES BARBIER - Très simplement, au moyen de points dont la configuration correspond à chacun des sons de la voix et que le réceptionnaire du message peut déchiffrer en y posant les doigts.
LE DIRECTEUR - En effet, c'est très ingénieux… Mais pourquoi les sons de la voix et pas les lettres.
CHARLES BARBIER - Parce que cela permet à des illettrés, qui ne connaissent pas l'alphabet, de se servir du procédé et je pense que vos aveugles…
LE DIRECTEUR - Mes aveugles ne sont pas des illettrés, bien au contraire! Mais poursuivons… Et votre système demande-t-il un long apprentissage?
CHARLES BARBIER - Il est plus rapide qu'on ne le pense. Ma "sonographie" d'ailleurs ne résout pas seulement le problème important de la lecture de nuit, mais assure aussi la confidentialité du message: il ne peut en effet être lu que par celui qui connaît le secret des combinaisons de points.
LE DIRECTEUR - C'est très intéressant… quoique cet aspect de la confidentialité soit pour nous secondaire. Et si je vous comprends bien, vous seriez prêt à mettre votre géniale invention au service des aveugles?
LOUIS BRAILLE - Maintenant que les guerres sont finies… j'en serais flatté.
LE DIRECTEUR - Je vous remercie. Nous sommes très intéressés et nous allons sans plus tarder mettre la chose à l'étude.

4 – (Braille améliore l'invention du capitaine Barbier et se brouille avec lui)
L'HISTORIEN DE SERVICE – Dans les années 1824-1826, les jeunes aveugles s'emparèrent de l'idée du capitaine Barbier et l'adaptèrent à leurs besoins.
LE DIRECTEUR PIGNIER - Nous avons, Monsieur, multiplié les expériences sur votre système de sonographie… Je vous fais tous mes compliments. Pour les aveugles, il est bien supérieur à l'ancien système des lettes en relief et nous en avons donné de nombreuses démonstrations. Je vous ai cependant amené aujourd'hui un de nos plus brillants élèves, Louis Braille…
CHARLES BARBIER - Bonjour, jeune homme…
LOUIS BRAILLE - Bonjour, mon capitaine.
LE DIRECTEUR - Il n'a que quinze ans mais il a pensé à quelques améliorations de votre invention qu'il voudrait vous soumettre.
CHARLES BARBIER - Améliorations…? Mais mon invention est achevée, je ne vois pas en quoi elle pourrait être améliorée. Il n'y a rien à y retoucher.
LOUIS BRAILLE - Ce ne sont pas des améliorations à proprement parler… votre système en soi est parfait… Mais tout au plus… disons, des… adaptations.
LE DIRECTEUR - Vous devez comprendre que les aveugles ne sont pas des soldats en campagne et que…
CHARLES BARBIER - J'ai peur d'avoir été très mal inspiré en venant vous offrir mes services. J'avais pour but de vous aider et pour me remercier, vous allez… Mais voyons, de quelles "adaptations" avez-vous donc eu l'idée?
LOUIS BRAILLE - D'abord nous avons pensé, puisque les jeunes aveugles sont éduqués ici dans le respect de l'orthographe et de la littérature, qu'il serait bon que les reliefs dont vous êtes l'inventeur ne représentent pas des sons mais des lettres.
CHARLES BARBIER - Mais mon jeune ami, vous mettez tout en l'air, qui vous permet…? Représenter les lettres! Je ne peux consentir…
LE DIRECTEUR - Mon capitaine, attendez… Il n'a pas fini!
CHARLES BARBIER - Il n'a pas fini! Mais savez-vous que je n'ai pas l'intention de le laisser continuer! Il n'a que quinze ans… C'est un enfant.
LE DIRECTEUR - Laissez-le tout de même dire ce qu'il suggère encore.
CHARLES BARBIER - Bien… Jeune homme, dites-moi ce que vous avez imaginé de plus?
LOUIS BRAILLE - J'ai imaginé ensuite que, pour rendre la lecture plus facile, il n'était pas nécessaire d'utiliser six colonnes de six points, ce qui fait trente-six points, mais seulement deux colonnes de trois points, ce qui fait seulement six points.
CHARLES BARBIER - Mais je ne vois pas comment… Deux colonnes de trois points…?
LOUIS BRAILLE - Les combinaisons de points que nous avons découvertes couvrent l'ensemble des lettres, des chiffres, des signes de ponctuation… Et surtout ils sont beaucoup plus faciles à "toucher" pour les lire du bout des doigts. J'ai d'ailleurs supprimé toutes les combinaisons qui, au toucher, ne sont pas claires.
CHARLES BARBIER - Voyez cette impertinence: "J'ai d'ailleurs supprimé toutes les combinaisons qui…" Jeune homme, pour qui vous prenez-vous?
LOUIS BRAILLE - Mon capitaine, je n'ai nullement l'intention d'être impertinent… Je suis aveugle et je me prends pour un aveugle. J'ai simplement travaillé pour rendre service à mes frères aveugles, qui se sont tous mis d'enthousiasme à lire mes deux colonnes de trois points.
CHARLES BARBIER - Et moi, je ne suis pas aveugle et je vois clairement que je n'ai plus rien à faire ici. Le temps finira par vous montrer que j'avais raison. Adieu, je vous abandonne à vous-mêmes.

5 – (Démonstration publique du Braille au cours de l'inauguration
des nouveaux bâtiments de l'école)
L'HISTORIEN DE SERVICE – Quelques années s'écoulèrent encore, pendant lesquelles Braille perfectionna encore le système et fut nommé professeur à l'Institut des jeunes aveugles. En 1844 le temps parut venu de faire connaître partout l'invention au cours d'une grande séance publique…
LE DIRECTEUR DUFAU – (parlant aux spectateurs comme s'il s'agissait des participants à une réunion de l'école des aveugles) Messieurs, Mesdames, mes chers amis, mes chers enfants… Lorsque j'ai pris la direction de l'Institut des jeunes aveugles, j'ai tout d'abord combattu farouchement le système d'écriture de notre ami Louis Braille, que je vois assis ici au premier rang de cette assemblée. Cédant à l'évidence, je dois reconnaître aujourd'hui que je me suis trompé et, cher Louis Braille, que votre système d'écriture répond exactement aux besoins des aveugles. Pour en convaincre maintenant cette assemblée, nous allons avoir le plaisir de vous faire la démonstration de son efficacité… Pour m'aider à cela je vais demander à l'un de nos illustres spectateurs de me rejoindre sur cette estrade et de me prêter son concours. Qui veut bien accepter?
UN SPECTATEUR - Moi, si vous voulez… Que voulez-vous que je fasse? (le spectateur monte sur l'estrade)
LE DIRECTEUR - Monsieur, je vous remercie. Je vais d'abord vous prier de désigner au hasard deux de nos élèves, qui seront les sujets de cette expérience.
UN SPECTATEUR - Eh bien… celui-ci…
LE DIRECTEUR - Parfait! Levrat, montez sur l'estrade. (il monte) Merci. Et lequel sera le second?
UN SPECTATEUR - Celui-là…
LE DIRECTEUR - Venez nous rejoindre, Gérard. (il monte) Merci… Nous allons maintenant, cher monsieur, faire sortir l'un des deux sujets que vous avez choisis… Lequel voulez-vous?
UN SPECTATEUR - Celui-ci (il désigne Gérard). Où voulez-vous en venir?
LE DIRECTEUR - Vous allez tout de suite comprendre. Gérard, voulez-vous sortir un instant de cette salle.
GERARD - Cela sera long?
LE DIRECTEUR - Non, non, rassurez-vous, très bref. (il sort) Et je vais maintenant vous demander, cher monsieur, de dicter à l'élève Levrat un court texte de votre fantaisie. Il l'écrira à notre façon, presque aussi rapidement que vous le dicterez, au moyen de la réglette et du poinçon que je vous montre ici. Êtes-vous prêt?
UN SPECTATEUR - Euh… vous me prenez au dépourvu… J'improvise : "Le vent qui souffle sur la place Saint-Sulpice balaye les feuilles d'automne. L'hiver n'est pas loin et bientôt la neige…"
LE DIRECTEUR - Cela est tout à fait suffisant. Merci! Levrat, avez-vous bien pris sous la dictée…?
LEVRAT - Mais oui. Voici mon texte…
LE DIRECTEUR - Parfait. Allez maintenant demander à Gérard de rentrer (il le fait). Gérard voulez-vous nous lire avec vos doigts ce qui est écrit sur cette feuille…
GERARD - C'est facile (il passe ses mains sur la feuille) : "Le vent qui souffle sur la place Saint-Sulpice balaye les feuilles d'automne. L'hiver n'est pas loin et bientôt la neige…"
UN SPECTATEUR - Étonnant! (l'assemblée applaudit)
LE DIRECTEUR - Je vous fais remarquer que ces deux élèves ont été pris au hasard. N'importe lequel d'entre eux aurait pu faire aussi bien. Monsieur le professeur Louis Braille, venez ici à votre tour, que l'on vous félicite, vous remercie et vous applaudisse. (Louis Braille monte sur l'estrade: nouveaux applaudissements)
L'HISTORIEN DE SERVICE - Permettez- moi pour terminer de jeter un coup d'œil prophétique sur l'avenir… Nous sommes en 1844. Notre ami Braille qui est fêté aujourd'hui, mourra malheureusement en 1852 à l'âge de 42 ans, mais son invention, elle, continuera à vivre et en 1854, le Braille sera adopté officiellement en France. En 1878, un congrès international le désignera comme le meilleur système de lecture pour aveugles dans le monde. En 1917, il sera adopté aux États-Unis et en 1949, l'UNESCO le fera adapter pour toutes les langues… Et en 1952, les cendres de Louis Braille ont été transférées au Panthéon.


RAPPEL HISTORIQUE

La pièce ci-dessus n'apporte qu'une vue très simplifiée de l'histoire de l'invention du Braille, qui s'étend de 1784, date de la fondation par Valentin Haüy de la première école pour aveugles, jusqu'à 1949, où il devint internationalement reconnu. Ne pouvant décrire ici en détail le cheminement très chaotique de la découverte, nous nous contenterons d'apporter quelques indications sur les principaux personnages qui la portèrent.
Valentin Haüy (1745-1822), frère d'un illustre chimiste, l'abbé René-Just Haüy, fut lui-même un linguiste éminent qui pratiquait une dizaine de langues modernes, pour ne pas parler des langues anciennes. Il exerça longtemps la charge d'interprète officiel de l'Etat. Il rencontra un jour un jeune aveugle, François Lesueur, auquel il s'intéressa, qu'il s'efforça d'instruire et avec lequel il fit les premiers essais de lecture grâce à des caractères imprimés en relief sur du papier gaufré. Il en fit une communication officielle à l'Académie des Sciences en 1784 et fonda en 1786 l'Institution des enfants aveugles. Obligé sous le consulat de se démettre de ses fonctions, il partit pour la Russie où il dirigea pendant onze ans une nouvelle école. Revenu à Paris en 1817, il y mourut en 1822 et fut inhumé au cimetière du Père-Lachaise.
Charles Barbier de la Serre (1767- ? ) fut un personnage original que les hasards de la vie firent entrer dans une école militaire (probablement Brienne, où se trouvait à la même époque Bonaparte). Pendant la Révolution il s'exila aux Etats-Unis. Revenu en France, la capitaine Barbier, à une époque où, pour des raisons politiques et militaires, on s'intéressait à la transmission rapide des messages (télégraphie Chappe), se passionna, en tant que militaire, pour une écriture qui puisse permettre de communiquer dans l'obscurité. Il inventa alors un procédé qui permettait de tracer des messages avec un simple canif. Pour simplifier l'apprentissage, il prit en compte, non pas les lettres de l'alphabet, mais les sons de la voix (sonographie), chaque son étant signifié par des perforations sur une table de six par six, soit 36 points. Il mit même au point une machine qui permettait de graver plus rapidement les messages. En 1921 il songea à proposer son procédé aux aveugles qui manifestèrent un vif intérêt… C'est alors que Louis Braille prit le relais.
La vie de Louis Braille (1809-1851) est d'une grande simplicité… Entré à dix ans à l'Institut des jeunes aveugles, il y passa toute sa vie, à l'exception de quelques séjours dans sa famille à Coupvray. Entré comme élève, il y devint ensuite professeur. Il y mourut à 42 ans d'une tuberculose qu'il avait probablement contractée dans les locaux très insalubres de l'Institut. C'est dès l'âge de 16 ans qu'il apporta au procédé Barbier deux modifications essentielles : d'abord, ce ne sont plus sur les sons que l'on travaille, mais sur les lettres… ce qui va avec les études littéraires que font les aveugles. Ensuite, ce qu'un aveugle seul pouvait apporter, il a l'idée de condenser les signes à écrire et à lire sur une figure de six points. Ainsi les aveugles, dont le toucher est extrêmement sensible, peuvent les déchiffrer d'un seul mouvement et par conséquent très rapidement. Les cendres de Louis Braille furent transportées au Panthéon en 1952 .