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Déposé à la SACD

ALESIA

par Michel Fustier
(toutes les pièces de M.F. sur : http://theatre.enfant.free.fr )


PERSONNAGES:
Du côté des Romains: César. Hirtius, son secrétaire.
Marc-Antoine, son adjoint.
Du côté de Gaulois: Vercingétorix, le grand chef.
Eporédorix et Teutomachos, chefs de tribus. Un druide.

L'HISTORIEN DE SERVICE - Au premier siècle avant Jésus-Christ, les Romains occupaient déjà tout le sud de la Gaule. Le reste de pays était peuplé de nombreuses tribus gauloises et César, le grand général romain, entreprit d'en faire la conquête. Les Gaulois étaient très forts et très courageux, mais pas aussi bien organisés que les Romains. Après une longue lutte, ils se laissèrent enfermer dans la citadelle d'Alésia où ils furent définitivement vaincus par les légions romaines en 52 avant J.C. Sur la scène, d'un côté les Gaulois, de l'autre les Romains...

1 – (dans le camp des Gaulois)
VERCINGÉTORIX - Nous les avons vaincus à Gergovie, nous avons détruit leurs réserves d'armes et de vivres à Noviodunum. Et maintenant, ils se replient honteusement vers le Sud en abandonnant leur conquête. Ô mes frères gaulois, nous allons attaquer et vaincre définitivement les Romains.
ÉPORÉDORIX - Est-ce que nous ne ferions pas mieux, ô Vercingétorix, de les laisser tout simplement partir, puisqu'ils s'en vont?
VERCINGÉTORIX - S'ils peuvent s'en aller, Eporédorix, ils reviendront: détruisons-les.
TEUTOMACHOS - Et si ce sont eux qui nous détruisent. Ce César est redoutable!
VERCINGÉTORIX - Domine ta peur, Teutomachos! Est-ce que les dieux ne sont pas avec nous? Qu'en dis-tu, ô Druide, père vénéré?
LE DRUIDE - Mon fils, votre devoir est d'attaquer et de détruire les Romains: les dieux le veulent; ils me l'ont dit! Et pour cela, que chaque cavalier fasse un serment...
TEUTOMACHOS - Lequel?
LE DRUIDE - Que celui qui n'aura pas, par deux fois, traversé de part en part les lignes ennemies en tuant tout sur son passage, que celui-là s'interdise à jamais de revoir sa maison, son toit, sa femme, ses enfants...
ÉPORÉDORIX - Nous en faisons tous, ô Vercingétorix, le serment solennel.

2 – (sous la tente de César)
CÉSAR - Écris, Hirtius, écris: "Quand César apprit que les Gaulois voulaient attaquer son convoi, il mit ses bagages à l'abri au milieu des légions et lança sa cavalerie, qu'il fit soutenir par les fantassins. À la fin...",
HIRTIUS - À la fin.... César ?
CÉSAR - "À la fin, comme le combat était encore indécis, César fit donner ses cavaliers germains, qui balayèrent en un seul passage tout ce qui restait des Gaulois. Ils s'enfuirent tous. Aucun, en tout cas, contrairement à leur serment, n'avait traversé par deux fois les lignes romaines... " Que veux-tu, Marc-Antoine?
MARC-ANTOINE - César, César, l'armée gauloise en déroute se dirige, à la faveur de la nuit, vers la citadelle d'Alésia. Ils vont certainement s'y réfugier.
CÉSAR - C'est bien ce que j'avais prévu. Laisse-moi le temps de finir ma relation... et arrange-toi pour qu'au petit matin les Gaulois soient complètement encerclés dans Alésia.

3 – (dans la citadelle d'Alésia)
VERCINGÉTORIX - Ici, nous ne craignons rien. Regarde: Alésia est une forteresse naturelle, un haut plateau entouré de murs puissants... César n'attaquera jamais.
TEUTOMACHOS - Pourtant les Romains se déploient à nos pieds... Mais que font-ils?
VERCINGÉTORIX - Ciel, ils bâtissent une contrevallation! Ils nous entourent de fossés et de murs...
TEUTOMACHOS - S'ils ne veulent pas nous attaquer, ils veulent du moins nous enfermer dans notre refuge, comme des renards pris au piège!
VERCINGÉTORIX – Si c'est cela, avant qu'ils n'aient achevé, il faut que nos derniers cavaliers s'échappent pour aller lever une armée de secours dans toute la Gaule... Qu'ils profitent de la nuit pour partir tout de suite
TEUTOMACHOS – Je vais moi-même m'en assurer.

4 – (au pied d'Alésia avec les troupes romaines)
CÉSAR - Quand vous aurez fini la contrevallation, vous la protégerez par tous les moyens imaginables: des pièges à loup, des fosses, des pals, des crochets, des buissons de branches pointues: qu'ils ne puissent pas faire de sorties.
MARC-ANTOINE - Oui, César! Mais pense aussi à l'armée de secours des Gaulois: quand elle arrivera, il faudra non seulement nous protéger contre les Gaulois d'Alésia, mais aussi contre ceux qui arriveront dans notre dos.
CÉSAR - Alors, qu'en plus on construise une autre ligne de fortifications tournée vers l'extérieur: des levées de terre, des fossés, des tours et tout le reste... Une circonvallation!
MARC-ANTOINE - C'est un travail considérable: tu nous fais remuer les montagnes...
CÉSAR - Nos légionnaires savent tout faire: ce sont les meilleures troupes du monde! Et maintenant, regarde: notre camp est bien défendu, à l'intérieur comme à l'extérieur, et nous avons des vivres en quantité.

5 – (dans Alésia assiégée)
VERCINGÉTORIX - Et à nous, Gaulois, assiégés depuis huit jours dans Alésia, que nous reste-t-il en fait de vivres?
TEUTOMACHOS - Presque rien. Nous avons le ventre vide et nous sommes malades… Quatre-vingt mille hommes enfermés sur ce plateau, sous le soleil d'été, ça pue la merde... Sans parler des morts et les blessés! Ni des carcasses de vaches qui pourrissent...
VERCINGÉTORIX - Pour tenir plus longtemps, chassons de la ville toutes les bouches inutiles: les vieillards, les femmes, les enfants...
TEUTOMACHOS - César n'est pas fou: il les laissera mourir entre les lignes. Mort horrible!
VERCINGÉTORIX - Tant pis! Nous devons tout faire pour nous conserver vivants, nous qui sommes l'élite de la Gaule. Et dès que l'armée de secours fera son apparition, nous attaquerons.

6 – (dans le camp des Romains: la bataille est imminente)
MARC-ANTOINE - Les voilà. C'est l'armée de secours. Ils sont deux cent cinquante mille... C'est colossal! Ah, ces Gaulois! On entend au loin monter leur clameur...
HIRTIUS - Oui, et les assiégés aussi les ont entendus, ils leur répondent!
MARC-ANTOINE - Heureusement qu'ils ne sont pas une véritable armée mais qu'ils ne forment en réalité qu'une masse indistincte et indisciplinée.
HIRTIUS - Oui, mais ils sont vigoureux et courageux!
MARC-ANTOINE - Justement, je parie qu'en arrivant, ils vont foncer tête baissée, sans même se donner le temps d'examiner nos points forts et nos points faibles. J'y vais. Nous allons avoir à faire face sur deux fronts!... Réveille César, il dort comme un bienheureux.

7 – (la bataille)
CÉSAR - Voilà, je rentre de la bataille. Hirtius, écris: "Pour la troisième fois depuis quatre jours les Gaulois attaquent. De l'intérieur et de l'extérieur! Vers midi, ils se sont portés en masse sur trois endroits différents. Les Romains, qui doivent combattre de tous les côtés, ont beaucoup de peine à les contenir. Selon son génie, César déplace les renforts d'un point à un autre, partout où il le faut. Les adversaires sont maintenant au corps à corps. À la fin, César lui-même, enveloppé de son manteau rouge, prend personnellement part au combat. Cependant, quand la cavalerie des Germains, que César avait envoyée pour tourner les positions ennemies, déboucha enfin, elle dispersa totalement l'armée gauloise. Sévèrement battue, l'armée de secours battit en retraite. Quant aux assiégés, désespérés, ils regagnèrent leur citadelle."

8 – (sur le champ de bataille, après la victoire des Romains)
VERCINGÉTORIX - Mes frères, nous sommes définitivement vaincus. Je suis votre chef, je vais aller m'offrir à César pour qu'il se venge sur moi et vous laisse la vie sauve. Laissez-moi passer...
MARC-ANTOINE - César est assis sur une estrade et il regarde Vercingétorix qui s'avance, jette ses armes et s'agenouille devant lui. Il reçoit sa soumission sans un mot.
HIRTIUS - Tous les autres Gaulois sont également faits prisonniers. À certains, le grand César rendra la liberté, d'autres seront exécutés, d'autres encore deviendront les esclaves des légionnaires, à raison d'un par tête. Ce siège, qui a rassemblé de part et d'autre près de quatre cent mille combattants, a été le plus formidable jusqu'à ce jour. Il a confirmé que la valeur des soldats gaulois n'a rien pu contre la science militaire et le courage des Romains.

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