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HISTOIRE DE JOB
Très librement, d'après le livre de la Bible

- 1 -
L'HISTORIEN DE SERVICE - Je ne sais pas exactement dans quel temps cette histoire se situe, ni dans quel lieu, mais ce qu'il y a de sûr, c'est qu'alors Satan était un des principaux conseillers de Dieu. Et, comme si Dieu avait à reconquérir son admiration, il fit venir Satan auprès de son trône et lui dit:
DIEU - Toi dont l'office est de semer le mal partout, regarde un peu ce que je viens de découvrir…
SATAN - Quoi donc, Seigneur?
DIEU - Un homme dans lequel tu ne verras point de mal. C'est mon serviteur Job. L'aurais-tu oublié? Il est droit et juste, il observe mes commandements, il est sans ruse ni malice, il n'a jamais commis une injustice, il fait la charité aux pauvres, il jeûne aux temps prescrits, il me remercie chaque jour de mes bienfaits…
SATAN - Laissez-moi regarder… Oui, je vois aussi que c'est un homme riche et en bonne santé. Sa femme lui a donné sept fils et trois filles, il possède sept mille moutons, cinq cents paires de bœufs, cinq cents ânesses… Il a aussi des serviteurs, des champs, de nombreuses maisons…
DIEU - En effet… Cela n'empêche pas qu'il soit juste et bon.
SATAN - Cela ne l'empêche pas, mais cela l'explique.
DIEU - Que veux-tu dire?
SATAN - Je veux dire que lorsqu'on est riche et en bonne santé, il est facile d'être vertueux, même si, et je fais tout pour ça, ce n'est pas toujours le cas.
DIEU - La véritable explication ne serait-elle pas plutôt que dans le fond de son cœur et sans tenir compte de ses richesses, il est de par sa nature un homme comme je les aime?
SATAN - Je me demande comment vous pouvez être aussi naïf. Vous croyez connaître le cœur de l'homme… Mais très bien, faisons-en l'expérience. Retirez votre main de dessus sa tête et autorisez-moi à le dépouiller de tous ses biens, de ses enfants, de ses serviteurs et de toutes ses bêtes… et nous verrons bien si, par amour de la vertu, il continue à être vertueux et chaque jour à vous remercier de vos bienfaits.
DIEU - Je suis tout à fait sûr de lui. Mais si tu veux et pour que toi aussi tu finisses par l'admettre, je t'autorise à lui faire ce que tu as dit. Es-tu satisfait?
SATAN - Et me permettez-vous non seulement de lui enlever ses biens mais aussi de toucher à ses os et à sa chair jusqu'à que sa peau se dessèche et qu'il hurle de douleur?
DIEU - Si tu juges nécessaire d'aller jusque là… oui, bien qu'à regret, je te le permets. Cependant laisse-lui la vie…
SATAN - Pour que nous voyions comment il se comporte?
DIEU – Exactement.

- 2 -
L'HISTORIEN DE SERVICE - Et cela arriva, et Job perdit tout ce qu'il avait et il fut frappé d'une lèpre maligne depuis la plante des pieds jusqu'au sommet de la tête. Et Job ruiné se retrouva assis sur un tas de fumier en train de se gratter la peau avec un tesson de poterie. Et Job dit:

JOB - Périsse le jour où je suis né
Et la nuit qui a dit: un enfant a été conçu.
Que le jour de ma naissance soit effacé du calendrier,
Que cette nuit soit considérée comme stérile!
Que ne suis-je mort dès le sein maternel,
Que n'ai-je expiré le jour où j'ai ouvert les yeux.
Si je n'étais pas né, je serais à présent dans la paix,
Je dormirais dans le calme et je jouirais d'un vrai repos,
Je serais comme ces heureux enfants qui naissent morts,
Je n'aurais pas été condamné à la vie, et je ne souffrirais pas.

- 3 -
L'HISTORIEN DE SERVICE - Les amis de Job vinrent le voir sur son fumier et le premier de ces amis, Eliphaz, dit:

ELIPHAZ - Ô toi, Job, dont les conseils ont affermi de si nombreux amis
Et relevé tant de ceux qui tu voyais chanceler,
Maintenant, le moment vient où toi-aussi, tu es à l'épreuve.
Tu rendais courage aux autres, c'est ton tour de souffrir maintenant!

Touché toi-même, voici que tu t'effondres…
Mais l'homme peut-il être juste en face de Dieu,
Un mortel peut-il être pur en face de son créateur?
Ne penses-tu pas que tu es devenu insensé?

J'ai vu l'insensé prospérer jusqu'à ce que sa maison s'écroule,
Jusqu'à ce que ses enfants et ses biens soient dispersés au vent du désert.
Heureux l'homme que Dieu prend la peine de châtier!
Ô job, ne méprise pas la leçon du Tout-Puissant.

L'HISTORIEN DE SERVICE - Et Job lui répondit… (7)

JOB - J'ai pour héritage des jours de souffrances,
Et des nuits de douleur me sont échues en partage.
Ma chair se couvre de vermine et de crasse,
Ma peau se fendille et se met à suppurer.

A peine couché, je me dis: quand viendra le jour?
Sitôt levé je me répète: quand viendra donc le soir?
Revenez, mes amis, ne soyez pas injustes,
Revenez, je vous dis que je suis innocent!

Qu'est-ce qu'un homme pour que Dieu s'occupe tant de lui
Et qu'il attache tellement d'importance à le persécuter?
J'aimerais mieux être étranglé tout de suite,
Je préférerais la mort à mes tourments…
Bientôt, je vais me coucher dans la terre:
Dieu, tu me chercheras et tu ne me trouveras plus?

- 4 -
L'HISTORIEN DE SERVICE - Et Baldad, un autre des anciens amis de Job, parla à son tour…

BALDAD – Tous ceci n'est que paroles!
Ainsi finissent tous ceux qui oublient Dieu;
Ainsi périt pour toujours l'espérance de l'impie.
Penses-tu que Dieu ait rendu injuste sa justice?
Je n'en dirai pas plus!

L'HISTORIEN DE SERVICE - Et Job lui répondit:

JOB - Oui, j'ai entendu que Dieu fait bien ce qu'il fait
Et comment l'homme aurait-il raison contre Dieu?
Dieu secoue violemment la terre sur ses bases,
Bouleverse les montagnes, arrête le soleil…

Mais si la terre est livrée aux mains des criminels
Il se voile la face pour ne pas le voir.
Il a pour lui la force et le droit,
A quoi servirait-il de l'assigner en justice?

J'aurais beau me nettoyer pour devenir blanc comme la neige
Et me tremper les mains dans un bain d'acide purifiant,
Cela ne changerait rien à la façon dont il me traite
Il m'a déjà abandonné dans l'horreur de mon bourbier.

Il m'a revêtu de peau et de chair,
Il m'a tissé d'os de muscles et de nerfs,
Il m'a octroyé vie et chaleur,
Sa providence a veillé sur mon souffle…
Mais alors que je suis épuisé,
Il me donne la chasse comme si j'étais une bête sauvage
Il déploie contre moi son infinie puissance…
J'aurais bien mieux fait de ne pas naître.

- 5 -
L'HISTORIEN DE SERVICE - Sophar, qui était aussi l'ami de Job, parla à son tour:

SOPHAR - Job, te moques-tu des gens qui t'écoutent,
Et personne ne va-t-il te reprendre une bonne fois?
Tu dis: je sais que j'ai raison, que mon opinion est vraie!
Est-ce toi, toi, Job, qui ose proférer de telles insanités?
Oh, si Dieu pouvait parler et te révéler de sa bouche
Les mystères de son insondable sagesse…! (12)

L'HISTORIEN DE SERVICE - Et Job s'emporta et dit:

JOB - Moi aussi, j'ai de l'esprit, je ne suis pas moins intelligent que vous.
Et vous, les gens heureux, vous dites en chœur: honte au malheur!
Vous n'avez que mépris pour celui dont les pensées chancellent.
Ce que détruit Dieu, ajoutez-vous, ne sera pas rebâti
Et nul n'ouvrira la porte de celui qu'il a enfermé. Les insensés!
Vous n'êtes que des charlatans, des médecins de mauvais conseil.
Si vous voulez qu'on vous prenne pour des sages, taisez-vous.

Dieu, assigne-moi au tribunal et je te répondrai.
Combien ai-je commis de fautes et de péchés?
Fais-moi connaître mes crimes et mes égarements…
Ou bien veux-tu simplement effrayer une feuille morte
Emportée par la tempête? O dérision!
L'homme né de la femme
Vit peu de jours, il est excédé par la misère.
Il est une fleur qui se fane, une ombre qui s'enfuit…
Et c'est de lui que tu t'occupes. Laisse-le au moins tranquille
Jusqu'à ce qu'il ait fini sa journée, comme un bon ouvrier!
Tu comptes mes pas, tu épies mes péchés,
Tu as caché et scellé mes crimes dans un sac
Pour être sûr de n'en pas oublier même un seul.

- 6 -
L'HISTORIEN DE SERVICE - Eliphas reprit alors: (15)

ELIPHAZ - Ecoute-moi, Job, je vais t'instruire,
Et je te dirai ce que tu devrais pourtant savoir.
Est-ce contre Dieu que tu oses te mettre en colère?
Qu'est-ce que l'homme pour se prétendre juste et pur?
Tout ce que tu racontes n'est pas autre chose que du vent!
Le méchant n'échappera pas à la mort et aux ténèbres.
Toutes les paroles que tu prononces ne servent à rien
Tout ce que tu dis ne sert qu'à te condamner toi-même.
Des justes Dieu lui-même ne fait pas beaucoup de cas,
Qu'en sera-t-il de l'être abominable et corrompu?

L'HISTORIEN DE SERVICE - Et Job lui répondit (16-17)

JOB - Tu es un affligeant consolateur;
Je n'ai que trop souvent entendu ce discours!
Dieu me livre au pervers et m'abandonne au méchant,
J'étais en paix, il m'a pris par la nuque et il m'a brisé.
Le souffle de ma vie s'épuise, mes jours s'éteignent.
Je vais entrer sans les séjours ténébreux de la mort,
J'ai dit au tombeau: tu es mon père et ma mère,
J'ai dit aux vers: vous êtes mon frère et ma sœur

- 7 -
L'HISTORIEN DE SERVICE – Baldad, indigné, reprit la parole. (18)

BALDAD - Tais-toi! Nous ne sommes pas stupides.
Le méchant ne peut pas prospérer,
Le malheur monte la garde à côté de lui,
Ses branches se flétrissent, ses racines se dessèchent.
Il s'enfonce lentement de la lumière vers les ténèbres
Et son nom est effacé de toutes les mémoires.

L'HISTORIEN DE SERVICE - Et Job lui répondit (19)

JOB - Sachez que c'est Dieu qui m'a porté tort,
Mais j'ai beau en appeler à la justice, il ne répond pas.
Il m'a démoli tout entier jusqu'à mes fondements
Il a déraciné mon espoir, il a détruit ma confiance.
Dites-moi pourquoi vous me poursuivez ainsi,
Pourquoi vous voulez vous repaître de ma chair?

- 8 -
L'HISTORIEN DE SERVICE - Eliphaz jugea bon d'ajouter quelque chose… (22)

ELIPHAZ - Est-ce à Dieu que l'on peut enseigner la sagesse?
Et vraiment, importe-t-il au Tout-Puissant que tu sois juste?
A-t-il intérêt à ce que tu te comportes bien?
Peux-tu être utile à Dieu en quoi que ce soit
Pour qu'il estime nécessaire de te laisser vivre?
Mais plutôt écoute-le et réconcilie-toi avec lui.

L'HISTORIEN DE SERVICE - Et Job lui répondit. (23)

JOB - Oui, j'irai devant son tribunal et je plaiderai
Et je remplirai ses oreilles de l'armée de mes arguments…
Mais pour le moment, je cherche au Nord et ne le trouve pas,
Je me tourne vers le Sud et je ne le rencontre pas!
Je ne me suis pas égaré loin de ses commandements,
J'ai gardé en mon cœur toutes les promesses de sa bouche.
Malheureusement le Tout-Puissant fait ce qui lui plaît
Et je sais qu'il ira sans moi jusqu'au bout de ses desseins.

L'HISTORIEN DE SERVICE - Et Baddad, qui avait déjà parlé, ajouta cependant: (25)

Pourquoi parles-tu ainsi? A Dieu sont la puissance et la majesté,
Comment l'homme pourrait-il paraître juste devant ses yeux?

- 9 -
L'HISTORIEN DE SERVICE - Les trois premiers amis de Job étaient des hommes de grand âge et de beaucoup de sagesse. Lorsqu'ils eurent parlé comme il vient d'être dit, un jeune homme du nom d'Eliu, qui était aussi un ami de Job, prit la parole à son tour… (32)

ELIU - Ce ne sont pas les plus âgés qui sont les plus sages!
Je suis jeune mais vous, vous n'êtes que de vieux radoteurs.
Aucun d'entre vous n'a été capable de répondre à Job.
Ecoutez-moi maintenant et vous verrez que je lui expliquerai.

Ô Job, tu as dit et je l'ai entendu de mes oreilles,
Que tu étais pur et que tu n'avais jamais commis d'iniquité!
Comment as-tu pu oser parler ainsi?

Vrai, lorsque l'homme est étendu sur sa couche
Et qu'il tord de douleur ses membres amaigris,
Dieu alors annonce à l'homme sa justice
Et la chair de l'homme retrouve l'allégresse …
Voilà ce que fait Dieu pour l'homme
Et il le fait une fois, deux fois, trois fois!

Et toi, Job, il t'aurait oublié? Allons donc!

Tu dis donc et tu répètes, Job, que tu es innocent,
Que Dieu te refuse l'appui de sa justice.
Mais Job, c'est toi qui es en train de blasphémer,
Tu profères le blasphème comme on boit de l'eau claire!

Dieu n'est pas inique, il n'est pas injuste,
Il ne traite pas l'homme selon ses prétendus mérites,
Il le traite exactement selon sa volonté,
Il le traite exactement comme il l'a décidé,
Selon son bon plaisir! Il irait, s'il le décide,
Jusqu'à récompenser le méchant et à punir le bon.
Qui pourrait s'opposer aux volontés de Dieu?
Tu déraisonnes, Job, tes propos sont insensés
Et tu mérites d'être pour toujours abandonné,
Car tes réponses à Dieu sont celles d'un impie.

Dis-moi, Job, si Dieu retirait à l'homme son souffle,
L'homme ne retournerait-il pas immédiatement à la poussière?
Est-ce que Dieu pourrait gouverner s'il était un ennemi du Droit,
Et comment lui, le Juste, le Puissant pourrait-il être inique?
Qui peut dire à Dieu qu'il a mal fait et qu'il est injuste?
Il est trop grand pour que nous puissions le comprendre.
Nos prières ne peuvent atteindre le Tout-Puissant
Et quand on le questionne, il ne répond pas

- 10 -
L'HISTORIEN DE SERVICE - Dieu, qui avait entendu ce qui s'était dit, prit cependant la parole (38)

DIEU - Moi qui ne réponds jamais, pour une fois je parlerai!
Du sein de la tempête je vais parler, entendez-moi!

Où étais-tu, Job, quand j'ai lancé la terre dans l'espace,
Quand j'ai lâché sur elle les tempêtes de la mer,
Quand à cette mer j'ai donné les nuées pour vêtement
Et que je lui ai prescrit de ne point déborder de ses rives?

Où étais-tu et que faisais-tu, je te le répète,
Quand j'ai lancé dans le ciel la ronde des étoiles
Et fixé son chemin à la grande ourse et à ses petits
Et quand j'ai posé les bornes de l'aurore et du crépuscule

As-tu visité les sources de la mer mugissante,
T'es-tu promené jusqu'aux portes de l'abîme de la mort
As-tu visité mes réservoirs de neige et de grêle
Dont j'ai fait provision pour les jours de détresse?

Qui a décidé du temps où les chamois mettent bas,
Qui a lâché l'onagre en liberté dans le désert,
Qui a appris au cheval comment galoper,
Il se moque de la peur et bondit dans la bataille.

Es-tu capable de capturer le Léviathan
Et de lui passer un mors dans la bouche?
De ses naseaux sort une acre fumée
Comme d'une marmite sur des charbons ardents.

Penses-tu pouvoir le pêcher au harpon,
Pénètreras-tu sa double cuirasse,
Ouvriras-tu les battants de sa gueule?
La terreur règne autour de ses dents…

Et Béhémoth, ma créature comme toi,
Quelle puissance il a dans ses reins!
Se os sont comme des tubes d'airain,
Sa carcasse comme du fer forgé!

Regarde-moi un peu dans les yeux, Job, comme un homme,
C'est moi qui ai pris mes décisions et tu n'as rien à m'objecter.

- 11 -
L'HISTORIEN DE SERVICE - Et Job cependant répondit à Dieu:

JOB - Devant toi, je ne suis rien, mais je parlerai quand même!
La terre, la mer, le soleil, la lune et le cheval, le Léviathan…
Dieu, dis-moi, n'es-tu bon qu'à faire l'étalage de ta puissance?
Si tu ne t'en occupais pas, le monde ne serait pas plus cruel.

(30) A présent mon âme se dissout dans ces jours de douleur!
La nuit me consume jusqu'à l'os et mon mal me ronge.
Tu m'as jeté dans la boue, je suis couvert de cendres.
Je crie vers toi et tu ne me réponds pas,
Je me tiens droit devant toi et tu ne me regardes pas.
Tu m'emportes dans la fureur de ton ouragan!
Je le sais, je le sais, tu me mènes à la mort.
J'espérais le bonheur, la malheur est venu,
J'espérais la lumière, les ténèbres sont arrivées,,
C'est comme si je brûlais d'un feu inextinguible,
Ma peau noircit, mes os sont dévorés de fièvre…

L'HISTORIEN DE SERVICE - Et Job, qui avait jusqu'ici refusé de prononcer les paroles célèbres : "Je sais que mon Sauveur vient et que mes os de rassembleront du fond de l'univers, que de nouveau je serai enveloppé de ma peau et que dans ma propre chair je verrai celui qui est mon Dieu…" que seraient-elles venues faire ici, ces paroles d'espoir? …qui jusqu'ici donc n'avait dit que des choses qui étaient dans la lettre de la Bible, Job, presqu'hors de lui, sortant de ses limites et s'adressant à ses amis, reprit… Pourquoi ne prophétiserait-il pas, lui aussi?

JOB - Et je ne suis pas Job seulement,

Je suis le blessé de guerre, je suis le cancéreux,
Je suis le vieillard paralysé qui attend de mourir,
Je suis la veuve effondrée, je suis le sans-abri malade,
Je suis l'exilé, je suis le torturé, je suis l'orphelin,

Je suis le broyé par la vie, le cassé par la révolte,
Je suis la mère qui vient de perdre ses enfants
Je suis tout homme en ce monde de douleur…
Et je m'en vais, répétant: pourquoi, pourquoi?

Dieu! Le monde sait déjà que tu ne lui sers à rien,
Alors, existes-tu? Comment pourrions-nous répondre…?
Et au fond, quelle importance? Oui, nous pouvons le dire.
Peut-être serions-nous moins scandalisés si tu n'existais pas!
Ni bien ni mal, ni récompense ni châtiment, mais simplement
Le fort vit, le faible meurt, rien du plus! Plus de scandale alors,
Mais seulement l'inébranlable dure loi de notre monde!
Et nous n'aurions plus à perdre notre temps en faux débats.
Maintenant, j'ai dit ce que j'avais à dire…

- 12 -
L'HISTORIEN DE SERVICE - Les amis de Job se retirèrent alors précipitamment. Job avait dit ce qu'il n'aurait jamais dû dire et ses mots excédaient toutes les fautes qu'il aurait pu commettre jusqu'ici… Ils allèrent prendre un bain et se purifier. Ils se lavèrent aussi soigneusement la bouche et les oreilles. Et la femme de Job vint et lui dit: "Pourquoi persistes-tu dans tes erreurs? Dieu donne, il enlève aussi bien… Maudis Dieu et meurs." … A moins qu'elle n'ait dit plutôt: "Bénis Dieu et meurs" Mais cela n'a plus d'importance maintenant! Et la femme de Job s'en alla.